Temps de lecture : 6 min

Ngalula Fuamba, est étudiante en génie industriel (Polytechnique) au Québec et athlète de haut niveau avec l’équipe du Canada. Après avoir pratiqué le football puis le football américain elle a décidé à l’âge de 19 ans de commencer le rugby. En août dernier elle décidait de laisser son équipe du Québec pour vivre une saison avec le Stade Toulousain Féminin en France.

Crédit Photo : Maëlle Filopon

Peux-tu me présenter ton parcours rugbystique ?

J’ai commencé à jouer au rugby par hasard en automne 2014 et depuis je n’ai pas pu m’arrêter. J’ai commencé par jouer pour mon club (ville Mont-Royal) à Montréal et ensuite j’ai pu me tailler une place dans mon équipe universitaire (Université de Montréal) et au sein de mon équipe provinciale (Rugby Québec). C’est lors de la tournée de novembre de 2017 que j’ai reçu mon premier “cap” avec Rugby Canada contre l’Angleterre. Depuis, j’ai participé à quelques tournées dont la tournée du top 4 à San Diego.

Pourquoi avoir décidé de quitter le Québec pour venir jouer en France

Pour me développer en tant que joueuse. Au Québec, à cause de l’hiver et la distance entre chaque ville et province, on a une saison très différente de vous en France. On joue notre saison club de mai à août, ensuite on enchaîne avec la saison universitaire jusqu’au mois de novembre et on participe au championnat canadien avec notre Équipe provinciale. Je voulais me concentrer sur une seule saison et une équipe. En plus, j’avais entendu parler de la qualité du Rugby à Toulouse et du style de jeu français. M’entraîner avec une préparatrice physique et jouer des matchs pendant une saison complète c’était un rêve pour moi.


Crédit Photo : Aubin Lipke

Comment as-tu décidé de rejoindre le club du Stade Toulousain Féminin ?

Je connaissais un peu la bonne réputation du stade Toulousain à travers une ancienne joueuse de Rugby Canada Latoya Blackwood. Après m’être entretenue avec l’entraîneur chef quelques fois, Anthony Granja, j’ai décidé de tenter ma chance à Toulouse!

C’était ta première longue expérience à l’étranger, est-ce qu’il a été difficile de partir de chez toi ?

C’était très facile de partir ! Le rugby nous donne la chance de partir et de voyager souvent. Donc, c’était quelque chose dont j’avais l’habitude. Le plus difficile pour moi a été de rester et de me sentir chez moi à Toulouse. C’est bizarre, mais dans une expérience comme celle que j’ai vécue, on vit constamment un paradoxe. On profite de chaque moment, chaque match comme si c’était le dernier et en restant dans le moment présent. Par contre je savais exactement combien de temps il me restait à Toulouse en permanence. Étant quelqu’un de très indépendante, j’ai aussi été très surprise du fait que ma famille m’aie autant manquée pendant. Mais ça je crois que c’est inévitable !


Crédit Photo : OLCO Photo

Peux-tu nous raconter une expérience qui t’a marqué sur le sol français ?

Le moment qui m’a le plus marqué c’est le match pré saison qu’on a joué contre Lons en septembre. Le déroulement de la journée m’a d’abord complètement dépaysée. Je n’avais jamais autant été prise en charge au niveau des repas, de l’horaire, etc. Toute la journée mobilisée pour un match à 15h, pour moi c’était du jamais vu dans une équipe club. Mais le plus beau moment c’était le soir, à la réception d’après-match. C’est difficile à expliquer, mais à un moment on s’est regroupé autour de l’enceinte et on a juste eu notre petit moment d’équipe. Ma coloc hollandaise s’est mise à raper en hollandais avec tout le swagger qu’une personne se doit d’avoir quand elle rape devant une équipe complète. Et on s’est toutes mises à chanter, à déconner et à danser dans une ambiance tellement familière. Je me suis dit que si en début de saison, alors qu’on se connaît à peine, on arrive à passer des moments aussi naturels et aussi drôle c’est que je suis à la maison. Je savais que j’avais pris la bonne décision.

As-tu remarqué des différences entre le rugby Canadien et Français ?

Beaucoup ! Je crois que c’est le jour et la nuit entre les deux styles de Rugby. Votre jeu inclus beaucoup de prise de décision et vous mettez la priorité sur garder le ballon en vie (la continuité) et rester debout. Je m’y attendais un peu avant d’arriver à Toulouse, mais j’ai pris du temps à m’y habituer. Au Canada et plus précisément au Québec, on a un héritage Français et Anglais. Donc, le rugby que je connais est beaucoup plus structuré et dicté. Je n’ai pas vraiment d’anecdote, mais essayez de suivre Laure Sansus quand elle sent un petit trou dans la défense près du ruck. C’est dans ces conditions que j’ai dû travailler sur mes courses de support. Impeccable. Pilier moderne qu’ils disent.


Crédit Photo : Alex Sport Ortega

Quels souvenirs gardes-tu de cette expérience au Stade Toulousain ?

Des souvenirs incroyables de camaraderie et de dépassement de soi. De voir autant de filles s’investir au sein de l’équipe pour se l’approprier. Malgré leur vie personnelle, les distractions, l’équipe vient avant tout. Chaque fille contribue au club et c’est vraiment une belle petite famille que je me suis faite à Toulouse.

Penses-tu ressortir enrichie de cette expérience ?

Complètement! C’est une expérience qui m’a beaucoup apporté humainement. Je suis partie de Montréal en me concentrant sur mes objectifs rugbystiques et sur ma performance individuelle, mais je repars avec des moments qui vont rester gravés dans mon esprit. Des visages, des conversations des gens qui m’ont accueilli dans leur quotidien. Ça je ne l’oublierai pas.