Les bleues ont disputé deux crunchs à une semaine d’intervalle : deux défaites 10-33 à Grenoble et 25-23 à Twickenham. Malgré les défaites, les bleues ont pu développer un jeu attrayant. Laure Sansus et Rose Bernadou, jeune révélation de cet automne, sont revenues avec nous sur leurs impressions de ces deux matchs.
Les joueuses du XV de France sont encore à Marcoussis jusqu’à la fin de la semaine. Ces quelques jours vont leur permettre de continuer le travail, digérer et analyser ces deux matchs.
Crédit photo : FFR
Comment s’est passée la préparation de cette double confrontation en temps de covid ?
Laure Sansus (demie de mêlée) : la préparation a été compliquée. Déjà parce qu’on a eu le match contre l’Irlande annulé. Puis il y a eu des cas de Covid donc on a dû rentrer pour être isolées chez nous. Une fois qu’on a eu les résultats et que tout le monde a été diagnostiqué négatif, on est revenues à Marcoussis où on a été isolées pendant 4 jours en chambre, seules, avec interdiction de se croiser, de se voir. On s’entraînait par groupe de 4 sans contact direct, avec une distanciation importante.
Une fois que la bulle sanitaire a été mise en place et qu’on a été sûre qu’elle soit saine, on est repassées en fonctionnement normal. C’est vrai que c’est un peu drastique mais on n’a pas le choix et il va falloir s’habituer à fonctionner comme ça malheureusement. Et on espère qu’avec ces fonctionnements plus stricts, on va pouvoir continuer à jouer.
Le championnat anglais est maintenu alors que le championnat français est à l’arrêt. Est-ce que cela a joué dans la préparation du XV de France ?
Rose Bernadou (pilier) : Franchement, je ne pense pas que ça ait changé quelque chose au niveau du rugby international. Ces confrontations étaient prévues et elles se sont maintenues. Et puis, au niveau du championnat français, on s’est arrêtées au moment du confinement un peu avant le match contre l’Ecosse donc je ne pense pas que ça ait pu jouer en notre défaveur.
“On sait que contre des grosses nations, et notamment l’Angleterre, le moindre faux pas est irréversible” (Laure Sansus)

Lors du premier crunch, vous tenez une mi-temps. Qu’est ce qui a manqué à la deuxième ?
Laure : C’est vrai qu’on tient bien la première mi-temps du premier crunch. On tourne à 10-10. En deuxième mi-temps, on commet deux erreurs, notamment sur du jeu au pied. Et on sait que les anglaises sont très cliniques, qu’elles nous font payer cash la moindre erreur, et c’est ce qui s’est passé. Les 30 points font mal parce que dans le jeu et dans ce qu’on produit, on est quand même à jeu égal avec elles. Mais, petit à petit dans le match, elles commencent à nous taper dans le dos, et nous, on commence à avoir du jeu au pied plus court jusqu’au moment où on fait une erreur. On leur donne deux ballons faciles, qu’elles contre-attaquent bien, comme elles savent le faire, et on le paie cash direct derrière.
Qu’avez vous travaillé particulièrement cette semaine entre les deux crunchs ? Qu’avez-vous réussi à mettre en place ?
Rose : Entre les deux crunchs, on a fait beaucoup d’analyses vidéos pour voir les détails qui n’allaient pas dans notre jeu. Après, on n’a pas eu énormément d’entraînements mais surtout des entraînements qualitatifs. On a mis les choses au clair, et on a vraiment fait attention aux détails qu’on avait analysés en vidéo. Donc entre les deux crunchs, c’était vraiment du détail pour avoir le meilleur jeu possible.
” On est surtout satisfaites de l’état d’esprit et de l’engagement dont on a fait preuve ” (Rose Bernadou)
Lors du 2e crunch, on a vu un autre visage de l’équipe, vous avez montré du beau jeu, vous avez fait vibrer les téléspectateurs. De quoi êtes vous le plus satisfaites lors de ce match ?
Rose : je dirais qu’on est surtout satisfaites de l’état d’esprit et de l’engagement dont on a fait preuve. On a tout donné, vraiment tout donné jusqu’à la 80e minute, même si le résultat ne reflète pas le match. On a été déçues et frustrées, mais je pense qu’on a quand même gardé la tête haute, que l’engagement et l’état d’esprit étaient là.
Laure : le fait d’arriver à presque gagner à Twickenham, chez elles, après un match difficile où ça a été dur de relever la tête, c’est déjà énorme pour nous. En plus, on arrive à créer plus de jeu, on se bride moins. On arrive à aller jouer d’un côté et de l’autre du terrain. On n’a pas de complexe de relancer de notre camp – contrairement à Grenoble où on avait peut-être joué petits bras et on s’était privées de jouer des coups. A Twickenham, on a tout tenté ! Et on voit que ça passe quand on ne se bride pas.
” [Lors de la 2e mi-temps du 2e crunch] on a un peu eu le même scénario qu’à Grenoble, à savoir qu’elles nous font payer cash la moindre erreur” (Laure Sansus)

Revenons sur la 2e mi-temps du 2e crunch. Les bleues mènent confortablement au score puis l’entrée des 8 anglaises (et non des moindres) donne une autre tournure au match avec 2 essais inscrits en quelques minutes et l’issue sera en faveur des anglaises. Qu’est ce qui a manqué aux françaises pour les battre ?
Laure : c’est sûr que lorsqu’elles font rentrer 8 joueuses titulaires habituelles, leur jeu devient plus mécanique et on voit qu’elles retrouvent des automatismes. D’ailleurs, avant leur entrée, on était un peu surprises de les voir rater des touches, quelques passes, et de voir qu’elles se perdaient un peu dans leurs lancements. On en a profité, on a fait ce qu’on a pu. Une fois qu’elles ont retrouvé leurs automatismes, on a un peu eu le même scénario qu’à Grenoble, à savoir qu’elles nous font payer cash la moindre erreur. Et on sait que contre des grosses nations, et notamment l’Angleterre, le moindre faux pas est irréversible.
Donc c’est à nous de travailler pour ne rien leur donner. Elles sont assez douées pour marquer des essais elles-mêmes, il ne faut pas que ça vienne de nous. Donc il faut vraiment qu’on progresse sur ça et qu’on arrive à ne rien leur donner.
Rose, c’était ta 3e cape, dont 3 titularisations (une contre l’Ecosse et les 2 crunchs). Tu t’installes sur le poste de pilier très exigeant. Comment s’est passée ton intégration dans le groupe?
Rose : mon intégration s’est très bien passée. Après, on est pas mal de Montpelliéraines dans l’équipe et, en étant en 3e année de Pôle, on a parfois des stages avec les filles du XV. Donc je les connaissais déjà un peu toutes. Ça s’est très bien passé, j’ai été très bien intégrée.
“C’est bien de pouvoir rencontrer des nations qu’on n’a pas l’habitude croiser. C’est un peu ça la magie de la coupe du monde” (Laure Sansus)
Laure, le XV de France va retrouver les Anglaises en poule de la coupe du monde. Quelles sont tes impressions par rapport au tirage au sort et à vos adversaires (Angleterre, Fidji, Afrique du Sud) ?
Laure : on savait qu’on aurait le Canada, la Nouvelle-Zélande ou l’Angleterre. C’est tombé contre nos meilleures ennemies où je ne sais pas comment on peut les appeler (rires). L’avantage c’est qu’on sait exactement ce qu’on doit faire et ne pas faire contre elles, car c’est une équipe qu’on a l’habitude de jouer.
En ce qui concerne Fidji et Afrique du Sud, on ne les connaît pas bien, on a peu de vidéos sur elles. Donc ça va être des matchs où il va falloir qu’on soit très propres dans notre jeu, car on ne sait pas trop ce qu’elles vont nous proposer. Ca sera sûrement des matchs denses physiquement, déstructurés, le contraire de ce que nous propose l’Angleterre. Mais pour nous, les joueuses, c’est bien de pouvoir rencontrer des nations qu’on n’a pas l’habitude croiser. C’est un peu ça la magie de la coupe du monde.
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